Changement climatique et coûts de production

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Intégrer le changement climatique pour améliorer la rentabilité de l’atelier bovin viande

Contexte

Les conséquences du changement climatique sont nombreuses et on assiste de plus en plus régulièrement à des épisodes météorologiques impactant les exploitations : épisodes de gel, de sécheresse, de pluies intenses…

L’été que nous venons de connaître en est la preuve.

Les agriculteurs doivent cerner ces aléas, et surtout les intégrer dans leur conduite pour pouvoir maintenir une rentabilité. Très concrètement, l’année dernière, les éleveurs de la montagne ont fait face à un épisode de gelée tardive combiné à une période de sécheresse qui a eu de nombreux impacts sur les systèmes : manque d’herbe, perte de rendement sur les céréales…

Ces impacts vont à leur tour avoir des conséquences sur le coût de production : coût alimentaire, frais de litière, frais de mécanisation.

C’est pourquoi une dizaine d’éleveurs bovin viande situés entre Rayssac – Brassac et Mazamet ont décidé d’approfondir la question en formation.

 

Au programme de la formation

  • Identification et compréhension des conséquences du changement climatique sur la conduite de l’atelier bovin viande,
  • Recherche de leviers permettant d’agir à l’échelle de l’atelier et/ou de l’exploitation pour atténuer et être moins vulnérable face au dérèglement climatique,
  • Identification des attentes sociétales vis-à-vis de l’élevage face au changement climatique,
  • Prise en compte du coût de production et de la rentabilité de l’atelier,
  • Mise en place d'un plan d’action cohérent sur le plan économique et pertinent face au changement climatique.

 

 

Comprendre : le climat n’est pas la météo

Un des premiers travail effectué par le groupe a été de prendre conscience de la différence entre météo et climat. En effet, lors des premiers échanges, quelques éleveurs ont souligné que « finalement des évènements climatiques types sècheresse ou épisodes de gel, leurs grands-parents en avaient aussi connus et que mettre cela sur le dos du changement climatique… ». Il est donc essentiel de bien différencier la météo c’est-à-dire le temps qu’il fait : le climat...  de la température, des précipitations…

Le climat c’est une série de mesures météorologiques enregistrées sur une durée plus longue (30 ans), qui permet de distinguer une tendance moyenne.  Alors, que nous indiquent les différents scénarii sur les évolutions à moyen et long terme du climat ? Selon les modèles, la température pourrait augmenter encore de 4 à 6°C d’ici 2100 avec une augmentation des « accidents climatiques ».

 

Evaluer quels seront les impacts pour les ateliers bovins viande ?

Les éleveurs ont pu travailler sur des projections climatiques et des indicateurs concrets  en fonction des communes des sièges d’exploitation.

Ainsi, si l’on considère le stress thermique des animaux... Pour rappel, au-delà de 25 °C les bovins sont en situation de stress et doivent s’adapter ce qui peut avoir des conséquences sur l’ingestion et la croissance des animaux.

Par exemple, sur Rayssac, sur la période actuelle, on observe en moyenne 45 jours avec des températures supérieures à 30 °C, on pourrait observer en moyenne jusqu’à 100 jours à l’horizon 2100 et plus de 120 jours pour  les années les plus chaudes (source : DRIAS / CNRM 2014).

 

Dans le cadre de la formation, les 10 éleveurs ont réalisé un diagnostic CAP’2ER de niveau 1. CAP’2ER est un outil d’évaluation environnemental et d’appui technique en élevage de ruminants.

Grâce à l’outil Cap’2ER (niveau 1), les éleveurs ont pu calculer par exemple leur empreinte carbone et identifier des leviers.

Cet outil permet également de mettre en évidence d’autres indicateurs techniques permettant d’optimiser les performances de son système tout en améliorant son impact sur l’environnement.

Cet outil propose 2 niveaux de diagnostic :

  • Niveau 1 : pour sensibiliser, (avec 30 données saisies)
    • outil pédagogique, évaluation rapide de l’empreinte environnementale
  • Niveau 2 : pour agir (avec 150 données)                 
    • outil d’aide à la décision, évaluation fine de l’empreinte environnementale, identification des marges de progrès et construction d’un plan d’action

 

Ainsi, les bilans carbone ont mis en évidence, qu’en moyenne pour le groupe, 34% des émissions de GES sont compensées par le stockage de carbone et stockent 411 kg de carbone/ha SAU bovin viande. Les éleveurs ont identifiés des leviers comme l’augmentation du pâturage ou l’utilisation de prairies multi espèces comme piste d’action pour s’adapter.

A titre d’exemple pour une exploitation du groupe :

Ils ont pu faire le lien entre les bilans carbone et les indicateurs de rentabilité de leur atelier. Sur le groupe la rémunération du travail exploitant est légèrement inférieur à 1 SMIC / UMO exploitant pour l’atelier. Un axe de travail pour améliorer ces résultats identifié par les éleveurs est la productivité de viande (dans le groupe, la productivité animale varie de 183 kg de viande vive à 359 kg de viande vive /UGB). Derrière cet indicateur se cache de nombreux points techniques dont la gestion de la reproduction du troupeau, la gestion des animaux improductifs ou encore la croissance des animaux.

 

Agir : identifier et mettre en place les leviers d’actions

Heureusement, l’agriculture dispose de nombreux leviers pour :

  1. Atténuer ses impacts :
    1. Optimiser ses consommations de fioul, d’engrais…
    2. Améliorer ses performances techniques sur le troupeau
    3. Renforcer son autonomie alimentaire et la part d’herbe
  2.  S’adapter aux évolutions climatiques
    1. Choix des espèces animales et végétales
    2. Diversifier les ressources et stocker
    3. Adapter les bâtiments

Focus sur les bâtiments :

  • Avoir un bâtiment tempéré
    • Ventilation naturelle
      • Plus de vitesse d’air, plus d’ouverture, bâtiment parasol…
    • Ventilation mécanique
      • Extracteur d’air, ventilateur, gaines soufflantes
    • Abaisser la température
      • Brumisation, douchage
    • Maîtriser l’humidité
      • Aire paillée saine, couchage avec matériau absorbant, fréquences de nettoyages
    • Réduire le rayonnement
      • Isolation, réduire le rayonnement direct

 

Tous ces éléments qui peuvent être travaillés individuellement par chaque exploitant ont donc à la fois un rôle positif sur l’amélioration de la rentabilité de l’atelier mais aussi sur sa capacité à atténuer et s’adapter au changement climatique.

Enfin, les agriculteurs ont pu découvrir les différents accompagnements et opportunités en lien avec la valorisation du carbone stocké.

Il existe aujourd’hui des dispositifs comme le Label Bas Carbone permettant aux éleveurs de rémunérer chaque tonne de carbone évité (réduction d’émissions de GES et/ou stockage de carbone). Cette rémunération est comprise entre 30 et 50 €/t de carbone.

L’Etat a également lancé le « Bon Diagnostic Carbone » et prend en charge 90 % du coût de l’accompagnement.
Cela comprend :

  • Un diagnostic carbone
  • Une analyse de votre vulnérabilité au changement climatique et un conseil agro-pédologique incluant des analyses de terre
  • Un plan d’action personnalisé avec des leviers bénéfiques tant au niveau économique que climatique
  • Un suivi du projet pour faciliter la mise en place des actions

Le diagnostic carbone permet également de s’inscrire dans la démarche du Label Bas Carbone.

 

 

Témoignage de Sébastien LOURDOU (éleveur bovins viande sur Rayssac)

  • Qu’as-tu retenu de la formation et qu’est-ce qui t’as le plus étonné sur le changement climatique ?

"Ce qui m’a le plus surpris c’est que dans les années futures la quantité annuelle de précipitations ne va finalement pas beaucoup changer. Par contre, c’est la répartition qui sera très différente avec des périodes de sécheresse sévères et des gros orages.

On aura également des amplitudes de températures en augmentation et des pics de chaleur très marqués.

Cela me conforte dans mon choix d’avoir arrêté le maïs ensilage (non irrigué) au profit de mélanges graminées/légumineuses qui me permettent de faire face à ces évolutions et d’avoir du fourrage pour mon troupeau".

  • As-tu été surpris par les résultats du diagnostic CAP’2ER niveau 1 ?

"Je pensais émettre moins de gaz à effet de serre par rapport à mon système basé sur l’herbe. Cela m’a permis surtout de prendre conscience du fonctionnement d’un bilan carbone".

  • Pourquoi as-tu réalisé un diagnostic de niveau 2 ?

"Pour aller plus loin, sachant qu’il est aidé pour l’instant à 90 %, je voulais aussi identifier des pistes d’actions pour améliorer mon système. Et puis pourquoi pas vendre mon carbone".

  • Qu’as-tu prévu de mettre en place finalement à la suite du diagnostic carbone ?

"Les actions que j’ai retenues suite à mes échanges avec Julien NEDELLEC de la Chambre d’agriculture sont :

  • Travailler sur la productivité du troupeau (réduire le taux de mortalité et baisser l’IVV)
  • Augmenter le pâturage notamment des génisses
  • Implanter des intercultures d’été
  • Augmenter la part de graminées/légumineuses dans mes prairies temporaires
  • Optimiser la consommation de carburant"


"J’ai commencé par faire un bilan carbone et au final je vais améliorer ma productivité globale de l’exploitation."

Plus d'informations

Sur les coûts de production

Clothilde CONSTANS-DOUMENGE

Conseillère d'entreprise - Secteur Gaillacois

Tél : 06 69 53 46 49

Plus d'informations

Sur le climat et le carbone

Julien NEDELLEC

Chargé de mission Climat Energie

Tél : 06 69 23 61 76